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Festival de musique de Coachella : mise en garde sur la prétendue hausse des cas d’herpès


Par Ludovick Ouellet-Harvey


Vous avez peut-être entendu parler du festival de musique de Coachella? Dans les derniers jours, plusieurs médias ont couvert l’évènement. Une nouvelle concernant ce festival a attiré notre attention. Il s’agit des articles parlant de la hausse des cas d’herpès dès la première journée de ce festival.


Les informations utilisées par les journalistes sont tirées du site web à potins TMZ et du site web HerpAlert. Le site web HerpAlert est géré par une équipe de médecins qui analysent les photos envoyées par des personnes inquiètes afin de poser des diagnostics visuels de l’herpès. Selon le site de TMZ, les médecins de HerpAlert font le diagnostic d’environ 12 personnes par jour, mais dès la première journée du festival de Coachella, ce sont des centaines de personnes qui ont fait affaire avec ce site. Au total, ce serait 1105 cas qui ont été rapportés à Indio, dans le désert de Palm Springs, dans la vallée de Coachella, à Los Angeles et à San Diego. Il s’agit des endroits où la plupart des festivaliers résident pendant cet évènement musical.


Maintenant que nous vous avons présenté la version rapportée par les médias, parlons des faits et des éléments à garder en tête lorsque nous lisons cette nouvelle. Tout d’abord, il existe deux types d’herpès. Le type 1, souvent appelé “feux sauvages”, se retrouve principalement autour de la bouche, mais peut aussi se retrouver au niveau des parties génitales. Le type 2, quant à lui, se retrouve presque exclusivement au niveau génital et très rarement à la bouche. Il faut souligner qu’en 2017, l’Organisation mondiale de la Santé estimait que 67 % de la population mondiale de moins de 50 ans était porteuse de l’herpès de type 1 et qu'11 % des personnes de moins de 50 ans étaient porteuses de l’herpès de type 2. Cela représente une proportion importante de la population. Il faut aussi savoir que des personnes peuvent être porteuses du virus sans le savoir.


Ensuite, deux informations très importantes ont été mises de côté dans ces articles. Premièrement, le diagnostic visuel de l’herpès n’est pas dans les lignes directrices canadiennes du dépistage. Cette méthode ne permet pas d’identifier le type d’herpès. Actuellement, les deux seules manières reconnues pour dépister l’herpès sont par un prélèvement au niveau des lésions (bouton) ou par une prise de sang pour aller détecter les anticorps. Les données qui sont utilisées pour parler « d’explosion de cas d’herpès » proviennent d’un site Web qui effectue des diagnostics visuels à partir de photographie. Bien que nous reconnaissons l’esprit d’initiative et l’expertise de ces médecins, le diagnostic visuel n’est pas recommandé au Canada. Les données présentées sont donc à prendre avec un grain de sel.


Deuxièmement, il est important de parler de la période d’incubation. Cette période est le moment entre la transmission du virus et l’apparition des premiers symptômes. Pour l’herpès, la période d’incubation est d’environ 6 jours. Il n’est pas possible que, dès la première journée, des personnes attrapent le virus et développent immédiatement des symptômes. Ceux et celles qui ont eu des symptômes et qui portent réellement le virus l’avaient bien avant le festival. De plus, les premiers symptômes ne signifient pas que c’est à ce moment que l’herpès a été transmis. Une personne peut être porteuse pendant plusieurs mois ou plusieurs années sans qu’il y ait de symptômes. Certains facteurs peuvent favoriser les récurrences, comme la fatigue, l’alimentation, le stress, l’exposition prolongée au soleil ou tout autre facteur qui affaiblit le système immunitaire. Dans un contexte de festival situé dans le désert, plusieurs de ces éléments peuvent être présents.


Enfin, on parle d’environ 1105 cas rapportés. Toutefois, il n’est pas précisé s’il s’agit de diagnostics officiels, qui devraient être confirmés par prise de sang ou par prélèvement, ou s’il s’agit simplement du nombre de demandes de personnes inquiètes sur HerpAlert. Il est important de se rappeler que l’herpès n’est pas un virus dangereux pour la santé. Il cause des boutons (appelés « feux sauvages » lorsqu’ils sont sur la bouche) inconfortables et douloureux, mais ils n’engendrent pas de maladies chroniques ou de problèmes de santé. C’est une des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) les plus répandues et tout le monde sera, à un moment ou un autre de sa vie, en contact avec le virus.


Lorsqu’il est question de l’herpès, la stigmatisation associée à ce virus fait souvent plus mal que l’infection elle-même. La publication d’articles sensationnalistes vient renforcer cette stigmatisation tout en propageant des mythes concernant l’herpès. Un soucis fréquemment mentionné par les personnes qui contactent le Projet Info-Herpès est de protéger les autres de ce virus. Or ce type d’article peut augmenter le sentiment de culpabilité de vivre avec le virus et la peur d’entrer en relation avec autrui. Environ 67% de la population mondiale est porteuse de l’herpès de type 1 et 11% du type 2. C’est donc un nombre important de personnes qui peuvent vivre de la discrimination lorsque de tels propos sont véhiculés dans les médias. C’est pourquoi il est important de demeurer critique lorsque vous lisez ce genre de nouvelles.


Bibliographie

Agence de santé publique du Canada. (2016). Lignes directrices canadiennes sur les infections transmissibles sexuellement. Section 5 : Prise en charge et traitement d’infections. Infections génitales au virus Herpès simplex (VHS). Repéré à https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies-infectieuses/sante-sexuelle-infections-transmissibles-sexuellement/lignes-directrices-canadiennes/infections-transmissibles-sexuellement/lignes-directrices-canadiennes-infections-transmissibles-sexuellement-32.html

Organisation mondiale de la Santé. (2017). Herpès (virus de l’herpès). Repéré à https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/herpes-simplex-virus

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